
La diversité dans le recrutement est devenue un enjeu majeur pour les entreprises, tant sur le plan éthique que légal. Face à la persistance des discriminations, le législateur a progressivement renforcé les obligations des employeurs pour garantir l’égalité des chances. Cet arsenal juridique s’accompagne de recommandations et d’incitations visant à promouvoir activement la diversité. Entre contraintes réglementaires et démarches volontaires, les entreprises doivent désormais intégrer cet impératif à leur stratégie RH. Quelles sont concrètement leurs obligations et comment peuvent-elles aller plus loin pour faire de la diversité un véritable atout ?
Le cadre légal anti-discrimination dans le recrutement
Le droit français interdit toute forme de discrimination à l’embauche. L’article L1132-1 du Code du travail énumère 25 critères prohibés, parmi lesquels l’origine, le sexe, l’âge, le handicap ou encore l’orientation sexuelle. Concrètement, un employeur ne peut écarter une candidature sur la base de l’un de ces motifs, sous peine de sanctions pénales pouvant aller jusqu’à 3 ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende.
Au-delà de cette interdiction générale, plusieurs dispositifs légaux visent à garantir l’égalité de traitement :
- L’obligation d’anonymiser les CV pour les entreprises de plus de 50 salariés
- L’interdiction des questions discriminatoires lors des entretiens d’embauche
- L’obligation de motiver tout refus d’embauche à la demande du candidat
Les entreprises doivent également mettre en place des procédures internes pour prévenir les discriminations. Cela passe notamment par la formation des recruteurs et la sensibilisation de l’ensemble des collaborateurs.
En cas de litige, c’est à l’employeur de prouver que sa décision de ne pas embaucher un candidat repose sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le Défenseur des droits peut être saisi et dispose de pouvoirs d’enquête étendus.
Enfin, certains secteurs sont soumis à des obligations spécifiques. C’est le cas de la fonction publique, qui doit respecter des quotas en matière de parité et d’emploi des personnes en situation de handicap.
Les obligations en matière d’égalité professionnelle femmes-hommes
La promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes fait l’objet d’une attention particulière du législateur. Les entreprises de plus de 50 salariés ont ainsi l’obligation de négocier un accord sur l’égalité professionnelle, qui doit notamment aborder la question du recrutement.
Depuis 2019, elles doivent également publier chaque année leur Index de l’égalité professionnelle. Cet outil permet de mesurer les écarts de rémunération et d’évolution de carrière entre les femmes et les hommes. Les entreprises obtenant un score inférieur à 75/100 doivent mettre en place des mesures correctives, sous peine de sanctions financières.
En matière de recrutement, l’index évalue notamment :
- La part de femmes et d’hommes parmi les 10 plus hautes rémunérations
- L’écart de taux d’augmentation entre les femmes et les hommes
- Le pourcentage de salariées augmentées à leur retour de congé maternité
Par ailleurs, les entreprises de plus de 1000 salariés ont l’obligation de respecter des quotas dans leurs instances dirigeantes. D’ici 2026, leurs conseils d’administration et comités de direction devront compter au moins 30% de membres du sexe sous-représenté, puis 40% en 2029.
Ces dispositifs visent à briser le plafond de verre qui freine encore trop souvent l’accès des femmes aux postes à responsabilité. Ils incitent les entreprises à repenser leurs processus de recrutement et de promotion interne pour favoriser une réelle mixité à tous les niveaux hiérarchiques.
L’insertion professionnelle des personnes en situation de handicap
L’emploi des personnes en situation de handicap fait l’objet d’une législation spécifique. Toute entreprise de 20 salariés ou plus a l’obligation d’employer des travailleurs handicapés dans une proportion de 6% de son effectif total.
Pour remplir cette obligation, les employeurs disposent de plusieurs options :
- L’embauche directe de personnes reconnues travailleurs handicapés
- L’accueil de stagiaires ou d’alternants en situation de handicap
- La sous-traitance auprès du secteur protégé et adapté
- Le versement d’une contribution financière à l’Agefiph
Les entreprises ne respectant pas ce quota sont soumises à une contribution annuelle, dont le montant peut atteindre 600 fois le SMIC horaire par unité manquante.
Au-delà de cette obligation d’emploi, les employeurs doivent mettre en place des mesures pour favoriser l’insertion et le maintien dans l’emploi des travailleurs handicapés. Cela passe notamment par :
- L’aménagement des postes de travail
- L’adaptation des horaires et des conditions de travail
- La formation et la sensibilisation des équipes
De nombreuses aides financières existent pour accompagner les entreprises dans ces démarches. L’Agefiph propose notamment des subventions pour l’adaptation des postes de travail ou la formation des salariés en situation de handicap.
Enfin, la loi impose aux entreprises de plus de 250 salariés de désigner un référent handicap. Ce dernier est chargé d’orienter et d’informer les personnes en situation de handicap, ainsi que de sensibiliser l’ensemble des collaborateurs sur ces questions.
La promotion de la diversité des âges
La discrimination liée à l’âge reste une réalité dans le monde du travail, touchant aussi bien les jeunes que les seniors. Pour lutter contre ce phénomène, plusieurs dispositifs légaux ont été mis en place :
Concernant l’emploi des jeunes :
- L’obligation pour les entreprises de plus de 300 salariés d’employer des alternants à hauteur de 5% de leur effectif
- Les aides à l’embauche pour les contrats d’apprentissage et de professionnalisation
- Le Contrat d’Engagement Jeune pour les moins de 26 ans éloignés de l’emploi
Pour favoriser l’emploi des seniors :
- L’obligation de négocier un accord ou un plan d’action sur l’emploi des seniors pour les entreprises de plus de 300 salariés
- Les aides à l’embauche pour les demandeurs d’emploi de plus de 45 ans
- Le contrat de génération, qui incite à l’embauche simultanée d’un jeune et d’un senior
Au-delà de ces mesures, les entreprises sont encouragées à mettre en place une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) intégrant la dimension intergénérationnelle. Cela peut se traduire par :
- La mise en place de binômes jeune/senior pour favoriser la transmission des savoirs
- L’adaptation des conditions de travail pour les salariés en fin de carrière
- Le développement de la formation tout au long de la vie professionnelle
La diversité des âges au sein des équipes est de plus en plus perçue comme un atout par les entreprises. Elle permet de combiner l’expérience des plus anciens avec la créativité et la maîtrise des nouvelles technologies des plus jeunes.
Les démarches volontaires pour aller plus loin
Au-delà du cadre légal, de nombreuses entreprises s’engagent volontairement dans des démarches proactives en faveur de la diversité. Ces initiatives permettent non seulement de se conformer aux obligations légales, mais aussi de faire de la diversité un véritable levier de performance.
Parmi les actions les plus courantes :
- La signature de la Charte de la diversité, qui engage l’entreprise à lutter contre toute forme de discrimination
- L’obtention du Label Diversité, délivré par l’AFNOR après un audit approfondi des pratiques RH
- La mise en place de programmes de mentoring pour accompagner les talents issus de la diversité
- Le développement de partenariats avec des associations spécialisées dans l’insertion professionnelle
Certaines entreprises vont encore plus loin en mettant en place des objectifs chiffrés de diversité dans leurs recrutements. Ces quotas volontaires peuvent par exemple concerner la part de femmes dans les postes de direction ou le nombre de jeunes issus de quartiers prioritaires recrutés chaque année.
La diversité est également de plus en plus intégrée dans la marque employeur des entreprises. Elles communiquent activement sur leurs engagements et leurs réalisations en la matière, afin d’attirer les meilleurs talents issus de tous horizons.
Enfin, de nombreuses entreprises mettent en place des formations pour lutter contre les biais inconscients dans le recrutement. Ces programmes visent à sensibiliser les recruteurs aux stéréotypes qui peuvent influencer leurs décisions à leur insu.
En allant au-delà des obligations légales, ces démarches volontaires permettent de créer une véritable culture de l’inclusion au sein de l’entreprise. Elles contribuent à faire évoluer les mentalités et à valoriser la richesse apportée par la diversité des profils.
Vers une approche globale de la diversité et de l’inclusion
Face à la complexité des enjeux liés à la diversité, les entreprises les plus avancées adoptent désormais une approche globale et transversale. Il ne s’agit plus seulement de se conformer aux obligations légales, mais de faire de la diversité un pilier de la stratégie d’entreprise.
Cette approche se traduit notamment par :
- La création d’un poste de Chief Diversity Officer rattaché à la direction générale
- L’intégration de critères de diversité dans l’évaluation et la rémunération des managers
- La mise en place d’Employee Resource Groups pour donner la parole aux collaborateurs issus de la diversité
- Le développement d’une politique d’achats responsables favorisant les fournisseurs issus de la diversité
L’enjeu est de créer un environnement de travail véritablement inclusif, où chacun peut s’épanouir et donner le meilleur de lui-même, quelles que soient ses différences.
Cette approche globale permet également de mieux répondre aux attentes des nouvelles générations, pour qui la diversité et l’inclusion sont des critères de choix importants dans leur recherche d’emploi.
Enfin, elle contribue à améliorer la performance globale de l’entreprise. De nombreuses études ont en effet démontré les bénéfices de la diversité en termes d’innovation, de créativité et de compréhension des marchés.
En définitive, si le cadre légal fixe un socle minimal d’obligations, c’est bien l’engagement volontaire des entreprises qui permet de faire de la diversité un véritable atout stratégique. Les organisations qui sauront relever ce défi seront les mieux armées pour attirer les talents et répondre aux défis d’un monde en constante évolution.
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